Autour de ...
Illusion d'Ithaque

Tableau

"Jeune homme au bord de la mer" (1837), par Hippolyte Flandrin, (1809-1864) tableau exposé au Musée du Louvre, Paris.
 
Sous une clarté lunaire, ce jeune homme méditatif en bord de mer était tout indiqué pour représenter "mon" Ulysse que j'ai finalement imaginé ne rentrant pas à Ithaque, mais s'échouant sur une île qui pourrait bien être une "Île des Morts"...
 
(source: Web Gallery of Art)

Épigraphe

C'est la fin du poème "Ithaque" (1911) du poète grec d'Alexandrie Constantin Cavafy (1863-1933).
 
"Quand tu partiras pour Ithaque, souhaite que le chemin soit long, riche en péripéties et en expériences...." ainsi débute ce poème qui ne fait pas du retour réel une condition indispensable à la réussite de sa vie et dans lequel Marguerite Yourcenar voyait "une mise en garde contre les illusions de la désillusion".
 
La traduction de Cavafy est celle Socrate Zervos et Patricia Portier parue aux Éditions de l'Imprimerie Nationale (collection "La Salamandre").
 
Le chanteur catalan Lluis Llach a fait de ce poème de Cavafy un oratorio particulièrement convaincant.

Autour du texte

Aux XXIV chants de l'Odyssée répond dérisoirement ce découpage du texte en vingt-quatre infimes parties... On ne lutte pas avec Homère, autant alors montrer clairement que l'on refuse le combat.

D.E.

Texte complémentaire

Tous les parcours sont initiatiques...

Tempête pérégrine

O soul, be chang'd into little water-drops
And fall into the ocean, ne'er be found !*

Christopher MARLOWE ( Dr Faustus, XVII )

La déesse de sable a des milliers de souvenirs. À l'ombre d'antiques cartulaires, ils jaillirent jadis, faisant vibrer l'espace étonné. Au fond de chaque regard, des bribes de ce savoir...
 
Mes yeux de mica se noient dans la ruine rituelle du jour quand se tatoue du nom aimé la peau informe du cauchemar. Sablier inépuisable du temps retrouvé, conjuré élu de cette bizarre sorcellerie, sur tes courbes je ruisselle. Cette plénitude tant espérée ! Homme de quartz dont la pulsation se fait chaque jour plus vive que celle de ton corps occupé mais indomptable. Attendrai-je ton printemps ? Sous mes pas crissent les fleurs les plus virginales. Je m'entends vivre avec délice dans la froide évidence du trépas. Anéantissement et volupté, comme toujours, se rencontrent en un triste traquenard. Innocent ! Je suis innocent ! (Paroles très inconsidérées !)
 

*

Comme le vent... Le vent qui passe, qui égrène le silence pour en tirer ses cris, qui mène la troupe des plus fantasques chasseresses. Le vent qui dénude, qui éparpille, qui parsème tous pays de chardons et de pleurs. Jamais il ne s'occupe, en sa course folle, de ce qu'on lui confie : testaments littéraires ou psalmodies magiques. Le vent qui s'insinue, qui halète, dernier soupir ou premier souffle, force invisible et indocile, élément primitif, voix première de la planète, écho du parler ancien, le parler des savoirs oubliés, dissimulés au plus profond des pierres...
 

*

De ces pierres levées depuis les plus hauts âges, pierres de la lisière et du bord du chemin, pierres jalons, pétitions, pierres terrifiées de tout ce sang séché, pierres taillées, entassées, rangées, alignées... À force de meurtrir mes mains endolories sur leur peau durcie, à force de leur offrir cette fragile chaleur qui m'anime encore, je sais qu'un jour j'en exhumerai la Mort qui s'y terre en son ultime repaire. Je sais qu'un jour – et ce jour sera irréfutablement ensoleillé – , ensemble, à nouveau, nous maîtriserons l'espace.

*

Homme de l'espace, homme mutant, en voyage prolongé, glissant sur la spirale, tu t'enfuis vers l'infini. Jamais un regard en arrière – quel pêché ce serait ! – , toujours vers la lumière dans un ballet endiablé. Toi le géant qui ensemences les étoiles pour ressembler aux Pères qui t'ont abandonné. Toi le forçat libéré, le don Juan écartelé, ta danse bien réglée est la reconnaissance de ta divinité.
 
Mais tu es de sang ... De sang et d'humeurs, de désirs et de peurs. Attentif à tous les tremblements, bouleversements, tressaillements, c'est à fleur de peau que frémit l'énigme qui t'endolorit. Pourtant, obstiné, aveuglé, c'est au loin, si loin, que tu pars guerroyer.
 
Comme la victoire est amère sous l'effusion de cette pluie
 
     chaude...
 
          drue...
 
               et archaïque.

*

Pluie plurielle, stellaire, pétales singuliers qui sans vergogne s'effeuillent du rameau divin sur l'orante vermine. Effluves d'humus comme souvenir de temps primordiaux. Comme larmes de Rê créant l'humanité ! Pluie flatteuse, cajoleuse, je me hasarde à ta douce conquête. Pluie, oh ! pluie voluptueuse !... Soyons enfin à l'unisson !...

Denys EISSART

*traduction de la citation:
 
Ô mon âme, change-toi, fais-toi gouttes menues
Tombe dans l'Océan, disparais pour toujours !

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